Parfois, je me demande à quoi ça sert encore, d’écrire. On est gavé·es de concepts psy à la mode, de punchlines sur le couple, de prêt à penser en stories et carrousels...tout le monde "explique", tout le monde "sait". Mais qui pense et questionne encore vraiment ? Qui ose dire “je ne sais pas” ?
Je dois t’avouer que je suis fatiguée. Fatiguée de voir l’amour et nos relations traités comme un tuto.
Fatiguée d’un prêt-à-penser relationnel qui sert des certitudes au lieu de susciter des réflexions de fond.
Fatiguée des “expert.es” et des discours bien rodés qui flattent l’algorithme mais pas la conscience.
Fatiguée de cette impression qu’on a collectivement désappris à penser l’amour, à le questionner, à l’habiter, même maladroitement. A mon sens on ne bâtit rien de solide quand on ne se donne pas, au moins, la permission de douter, de réfléchir, de creuser et ressentir puis nommer ce qui nous habite vraiment.
Moi, je crois encore à la profondeur. Et je crois qu’on mérite beaucoup mieux que des raccourcis. Je crois surtout qu’on a besoin d’espace pour penser, se questionner de manière existentielle, formuler (même maladroitement).
Je crois même qu’on a parfois besoin d’être secoués, d’être ramenés à nous-mêmes. Extraits de nos automatismes morbides, entre 2 stories Instagram et une réponse furtive sur un groupe WhatsApp.
Et surtout : je crois qu’on a besoin de liens et d’amour véritable. Mais pas celui qu’on vend, pas celui qu’on idéalise, qu’on performe ou que certains mettent en scène.
Alors j’ai choisi de t’écrire : des lettres, des vraies, à cœur battant, à coeur ouvert, parfois à cœur perdu.
Je les appelle Coeurespondance.
C’est un cabinet de curiosités où je dépose ce que je vois, ce que j’entends, ce que je questionne, ce que je ressens, ce qui me traverse et que j’ai envie de tordre dans tous les sens.
Un endroit sans vitrine, sans personnal branling, sans obligation d’achat ni d’être certain.e (surtout pas et sans façon).
Coeurespondance, ce sera ça : une suite de lettres écrites à celles et ceux qui aiment, mal, trop, pas assez, plus du tout, ou sans comprendre comment. Des lettres pour celles et ceux qui ne trouvent pas leur place dans les modèles qu’on leur vend, celles et ceux qui n’en peuvent plus des injonctions. Des lettres pour celles et ceux qui -comme moi-, n’attendent pas qu’on pense à leur place, mais qu’on les aide à penser par eux-mêmes. Des lettres pour celles et ceux qui (comme moi, encore), se posent des questions existentielles sur leurs relations et le sens de la vie.
Je parlerai humblement d’amour, bien sûr, mais aussi de solitude, de fatigue relationnelle, de nos galères, de ce qu’on tait dans le couple ou dans le huis clos de nos consciences. De nos masculinités en transition ou encore de la féminité qui s’échappe des clichés. Des émotions qu’on ne sait plus accueillir ni nommer, ou encore du lien qu’on voudrait vivant mais qui parfois s’éteint doucement, à force de trop vouloir “tenir”. Pour ne citer que cela.
Je parlerai du monde aussi, parce qu’il infiltre tout et que nos liens ne sont jamais hors-sol. Un monde pressé, stressé, individualiste, sauvage, qui nous rend parfois incapables de lenteur, de nuance, de lien.
Et pourtant : tout part de là, comme le dit Esther Perel, “la qualité de nos relations détermine la qualité de nos vies”.
Alors non, je ne suis pas là pour donner des réponses toutes faites, déso mais pas déso.
En revanche je m’engage à ouvrir des brèches, creuser des silences, allumer des questions, mettre un peu de sel, parfois, là où ça gratte. Et puis un peu de feu aussi, là où ça dort depuis trop longtemps.
Je t’écris parce que j’y crois encore à la parole vraie, à l’amour qui ne se résume pas, et aux liens qu’on peut bichonner, (ré)enchanter, réinventer, réparer, réhabiter. Parce que je crois qu’on peut encore créer ensemble un présent et un futur aimant que nous méritons tous.
Du fond du coeur et sans détour.
Anissa Ali.